Dans un tennis moderne où la puissance est devenue une condition sine qua non pour performer au top niveau, les joueurs de taille modeste paraissent désavantagés.

El Peque s’en est allé. Eliminé au deuxième tour du tournoi de Buenos Aires, Diego Schwartzman a définitivement rangé ses raquettes à l’âge de 32 ans. Parmi les accomplissements de l’Argentin, on retient notamment ses quatres titres ATP, sa finale à Rome avec une victoire en chemin contre Rafael Nadal, son magnifique quarts de finale victorieux contre son pote Dominic Thiem à Roland Garros ou encore sa huitième place mondiale atteinte en 2020. Petit mais costaud le Diego.
En réalité, ce qu’on retient en premier, c’est d’avoir réussi toutes ces prouesses du haut de son mètre 70 dans un tennis moderne où la puissance prédomine. Il y a un paquet de joueurs qui ont réussi une carrière sportive similaire à celle de Schwartzman et qu’on oubliera assez vite. Mais celui que l’on surnomme El Peque (“le petit” en espagnol) laissera une petite trace dans l’histoire du tennis car peu de joueurs de sa taille ont réussi à s’approcher des sommets comme lui.
Ferrer, Chang, Gaudio, Coria, Grosjean, Rod Laver ou encore Rios n’étaient pas immenses mais tous dépassent Schwartzman d’au moins cinq centimètres (sauf Rod Laver à qui il ne rend “que” trois centimètres). Pour retrouver des joueurs qui ne sont pas plus grands que l’Argentin et qui ont intégré le top 10, il faut remonter à Harold Solomon (1m68) et Eddie Dibb (1m70). Les deux ont atteint la cinquième place mondiale, respectivement en 1980 et en 1978, une autre époque.
Près de la moitié du top 30 dépasse 1m90
Auraient-ils atteint ce classement à l’époque de Schwartzman? Si la comparaison entre époques est toujours un exercice hasardeux, le doute est tout de même permis. Quand on regarde le top 30 actuel, les joueurs les plus petits mesurent 1m83 (Alcaraz, Ruud et de Minaur). Statistique encore plus parlante, 14 d’entre eux dépassent 1m90, soit près de la moitié des 30 meilleurs joueurs du monde.
Est-ce qu’il faut forcément mesurer plus d’1m80 pour performer au top niveau ? Ce qui est sûr, c’est qu’une grande taille apparaît désormais comme un sacré coup de pouce. Schwartzman lui-même avait confirmé dans une interview accordée à l’Equipe que sa taille avait “limité ses progrès” et “privé de certaines armes”.
Baez, nouveau porte-drapeau des petits gabarits ?
Malgré tout, le natif de Buenos Aires est parvenu à se faufiler parmi les 10 meilleurs mondiaux. Reverra-t-on un joueur de sa taille intégrer ce cap si symbolique ? Si on regarde les candidats actuels, il se pourrait bien que le successeur de Schwartzman soit également argentin, en la personne de Sebastian Baez (1m70). Voir l’actuel 31ème mondial et ancien pensionnaire du top 20 intégrer ce cercle prestigieux ne constituerait pas une énorme surprise. L’inverse aussi cela dit.
Parmi les autres membres du top 100, seul Nishioka ne dépasse pas 1m70. Mais pour le coup, voir le Japonais top ten ne relève en rien de l’évidence. Même si on s’arrête sur des joueurs un peu plus grands, on imagine difficilement Corentin Moutet (1m75), Luca Van Assche (1m78) ou Hugo Gaston (1m73) passer la barrière du top 10. Pourtant, le premier était une terreur dans les catégories jeunes et le deuxième avait remporté Roland Garros chez les juniors. Mais chez les grands, les deux semblent limiter par leur déficit de puissance pour franchir un cap.
Les géants rapides, une nouvelle espèce
Le plus inquiétant pour les petites statures, c’est que la direction que prend le tennis professionnel ne semble pas faire leurs affaires. Aujourd'hui, tous les observateurs de la petite balle jaune s’accordent sur un point : les joueurs n’ont jamais été aussi puissants. Dès 2016, Toni Nadal, dans l'Equipe, alertait sur l’évolution du tennis : “Il y a ces derniers temps une transformation très rapide vers un jeu sans stratégie qui fait boum, boum, boum, sur chaque point”. Si on admet la corrélation directe entre la taille d’un joueur et sa puissance, il devient de plus en plus difficile pour les petits gabarits de se frayer un chemin dans ce monde de brutes.
Pour compenser leur déficit de puissance, ces derniers doivent en partie s’appuyer sur une condition physique irréprochable. Avec eux, les points gratuits au service n’existent pas et chaque échange est un potentiel combat. Au bout d’un moment, la machine peut se fatiguer. Ce n’est sans doute pas un hasard si Schwartzman a pris sa retraite à seulement 32 ans. El Peque a d'ailleurs confié ressentir une lassitude physique et mentale à partir du tournoi d’Hambourg en 2022. Il avait alors 29 ans, un âge où les sportifs ne sont généralement pas très loin de leur apogée.
On pense souvent que les grands sont puissants et les petits rapides. Une caricature, qui n’a plus de trop de sens aujourd’hui. Des joueurs comme Zverev ou Medvedev, qui mesurent tous les deux 1m98, sont très à l’aise pour déplacer leur grande carcasse. Ils bénéficient des avantages de leur taille sans en subir les inconvénients. L’Allemand et le Russe représentent un nouveau profil de joueur qui n’existait pas avant les années 2010. Avec eux, la taille moyenne des joueurs du top 10 a encore augmenté. Elle était de 1m83 au 31 décembre 2004 contre 1m87 fin 2014 et 1m90 fin 2024. Reste à savoir si un héritier de Schwartzman sera en mesure de baisser cette moyenne dans les années à venir.
Siempre Diego 🇦🇷
— Tennis TV (@TennisTV) February 13, 2025
32-year-old Diego Schwartzman’s career comes to an end at the hands of Pedro Martinez in Buenos Aires.@ArgentinaOpen pic.twitter.com/iAzBOWc4Ig
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Commentaires
Petit par la taille mais son coeur est grand !! Vamos Pequeeeee
Bel article
Captivant
Bravo 👏